vendredi 11 mai 2018

Nouvelle vie de Cahuzac: on croit rêver!

Jérôme Cahuzac, alors homme politique de premier plan, a fraudé le fisc. Bien pire, il a continué à le faire aussi pendant qu’il était ministre, et pas n'importe quel ministre: celui du Budget, c’est-à-dire LE poste où l’on combat la fraude fiscale. Il a été découvert, condamné en première instance. Il a choisi de faire appel, personne ne l’y a forcé, et il attend maintenant l’arrêt de la cour, qui devrait être prononcé à la mi-mai.

Et voilà-t-y pas que je découvre un article de presse (et dans Le Point, en plus!) où l’on étale avec complaisance les malheurs du pauvre garçon, où l’on s'apitoie sur sa “triste nouvelle vie”: cette homme qui “n’a plus rien”, vit “comme un ermite”, “seul avec son chien” (ah? il a de quoi nourrir un chien, alors?)...

Tout de suite, je m’imagine un gars à la rue, vivant quasiment sous les ponts, au bord de la SDF-itude... surtout que la patron du groupe politique majoritaire à l’Assemblée en rajoute: “il vit tout seul comme un malheureux”... On est prêt à sortir sortir les mouchoirs.

Et puis, quand même, au détour d’une phrase, et avec une naïveté qui serait touchante si elle ne trahissait pas la profonde niaiserie du journaliste (le papier n’est pas signé), on apprend que cette misérable vie se déroule “au sud de la Corse” (c’est toujours est mieux que la jungle de Calais, il y a plus de soleil), “dans la maison familiale” (allons, bon! il a quand même un toit sur la tête, ce pauvre homme, et puis, une maison de famille, c’est économique, côté loyer), et que ses activités sont “la pêche sous-marine, la course [qu’on suppose “à pieds”], le vélo (il n'a pas été obligé de le vendre, son vélo? il lui reste encore des ronds, alors?) et la lecture...

Parfois, je me demande dans quel monde vivent certaines personnes... Pourtant, ce n'est pas faute de nous montrer à longueur de journée toutes les horreurs du monde, donc, on sait ce que c'est que d'être vraiment malheureux... et mettre Cahuzac quasiment dans le même panier, en plaignant ce pauvre gars (qui a quand même trahi la confiance des Français d’une manière odieuse) contraint à passer ses journées au soleil de la Corse, dans une baraque qu’il occupe gratos, à se balader à vélo ou à pied avec son chien, à lire des bons bouquins et à faire de la pêche sous-marine... Hmmm... Et voilà un joli mérou à griller pour ce soir, à l’ombre des pins, en contemplant la Méditerranée et en sirotant un pastis... Quel calvaire, vraiment!

Et dans Le Point, en plus, journal présumé sérieux! Si ça avait dans Gala, encore...  Repris en chœur par le reste de la presse, cela va de soi, dans l’espoir ans doute d’amadouer les magistrats sur le point de rendre leur arrêt... Tiens, j’espère qu'’ils lui colleront quelques bons mois de taule ferme, histoire de lui faire passer le goût du maquis et des châtaignes!

Quelle honte!