samedi 25 février 2012

Splendide décrépitude !

      Décrépitude, déliquescence, décadence, décomposition, ruine… autant de circonstances, autant de sujets fascinants pour celui qui, comme c’est mon cas, aime à se définir comme un « photographe de patrimoine ». Quoi de plus stimulant que de découvrir, au creux d’un vallon ou au détour d’une route étroite, les ruines chargées d’histoire d’un château-fort à demi ignoré, et parmi lesquelles on peut encore ouïr, moyennant un peu d’imagination, le fracas des armures, la clameur des hommes d’armes, le piétinement des sabots ? Et si ça peut être, en plus, un jour d’hiver, par un froid de gueux, alors que la neige menace, je vous laisse vous représenter l’ambiance…

Dans le cas que j’ai choisi d’illustrer aujourd’hui, c’était l’hiver, il faisait un froid de gueux et la neige menaçait sur les hauts plateaux d’Auvergne. La route aurait pu, d’un point de vue romantique, être plus étroite (ah ! on ne dira jamais assez les méfaits de la DDE sur l’imaginaire des photographes !), mais toujours est-il que la vieille bâtisse que je découvris au centre d’un village par ailleurs banal me décida instantanément à faire un arrêt-photo : cet ancien Hôtel des Voyageurs, qui proclamait fièrement posséder un « Auto Garage », avait visiblement cessé toute activité depuis des décennies, et les ans avaient laissé sur ses façades les traces superbes (de mon point de vue) de leur écoulement. Contempler ce bâtiment, imaginer comment il était à l’époque de sa splendeur, comment la vie s’organisait dans et autour de ce qui était certainement le point focal du village, tout cela était comme remonter le temps.

Ce qui me parut le plus symptomatique, ce fut qu’un établissement de cette taille ait pu être créé et prospérer là, au milieu de rien, au bord d’une petite route de campagne qui allait d’un nulle-part à un pas-grand-chose… Jadis, à l’évidence, on circulait sur cette route, parfois en automobile, mais à des vitesses moyennes n’ayant rien à voir avec celles d’aujourd’hui ; les étapes étaient plus courtes, et des voyageurs devaient bien s’arrêter là pour passer la nuit, car si leur nom fut donné à l’hôtel, ce n’est évidemment pas par hasard. À notre époque de TGV et d’autoroutes à péage, ces itinéraires d’intérêt local, cantonal, départemental sont devenus des arrière-cours seulement fréquentées par ceux qui y habitent : tous les autres, c’est-à-dire quasiment tout le monde, prennent la quatre-voies qui, sans doute, fait faire davantage de kilomètres, mais à une allure telle qu’on y gagne largement…

Ces deux photos ont été faites avec un zoom 24-70mm f/2.8 à des focales proches de 35mm. Sur la première, la perspective a été redressée dans Photoshop afin que les verticales ne convergent pas : le manque de recul m’avait obligé à incliner l’appareil vers le haut, créant ces déplaisantes convergences que, dans la vie, notre cerveau corrige automatiquement, mais qu’en photo, il nous faut travailler en post-production. J’ai ensuite basculé les photos en noir et blanc, qui me semblait plus propice à traduire l’ambiance que je voulais rendre, puis j’ai travaillé les curseurs pour obtenir le bon équilibre. Bien sûr, c’est assez frustrant de ne voir les photos qu’en 500 pixels de large, mais c’est le format de ce blog qui l’impose…

Hôtel des Voyageurs — Auvergne

Hôtel des Voyageurs — Auvergne

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