samedi 7 avril 2012

Vignetage ou… vignettage ?


Le vignettage, c’est ce phénomène optique qui, dans certains cas, provoque dans les angles un assombrissement de l’image. Cet assombrissement provient du fait que les lentilles circulaires de l’objectif doivent s’accommoder de formats de photos rectangulaires ou carrés, mais en tous cas présentant des angles droits pour lesquels un recouvrement suffisant n’est pas toujours prévu ni possible (c’est le fameux problème de la quadrature du cercle !). Lorsque la formule optique n’a pas été assez bien calculée, ou lorsque combattre ce défaut renchérirait trop le coût de l’objectif, ou encore lorsque le vignettage résulte d’un compromis rendu nécessaire pour traiter d’autres défauts que les ingénieurs opticiens doivent aussi combattre (manque de piqué, distorsion, aberrations chromatiques), cet assombrissement apparaît.

De nos jours, il semble que les opticiens aient davantage tendance à « laisser passer » ce défaut qui est assez facile à corriger informatiquement, au besoin par le boîtier lui-même, directement à la prise de vue. Sinon, il peut également être corrigé, ou au moins atténué, dans les logiciels de traitement d’image : par exemple dans Photoshop, menu Filter, article Lens Correction, puis onglet Custom qui donne accès aux deux curseurs Vignette.

« Vignette », disais-je… Eh oui, il s’agit là d’un emprunt fait au français, et bien sûr, ce mot nous renvoie tout de suite à l’idée de « vigne ». À juste titre, puisqu’à l’origine, une « vignette » était un petit texte, ou un motif graphique (dessin ou autre) de petite taille, tel qu’on aurait pu l’imaginer tenir sur une feuille de vigne. Les vignettes se sont répandues, notamment aux XVIIIe et XIXe siècles, comme motifs ornementaux dans les angles des pages des livres ou des gazettes, ou comme bordures décoratives, notamment sur les pages de titre ou de début ou fin de chapitre.

Les vignettes ont ensuite été utilisées aux débuts du cinéma pour fournir à certaines scènes des « encadrés » décoratifs ou des légendes explicatives (du genre « Pendant ce temps-là, au vieux château… »).

Donc, venant étymologiquement de « vignette », il était logique —et même inévitable— que le phénomène optique provoquant un certain obscurcissement des coins de l’image, ressemblant donc à une vignette, s’écrive « vignettage », puisque vignette prend deux « t ».

Or, depuis quelques années, plusieurs magazines photo ont pris la déplorable habitude d’écrire « vignetage », comme si ce mot était dérivé de « vigne » et non de « vignette » !

C’est évidemment une erreur grossière, et notons au passage que nos amis anglo-saxons, eux, écrivent toujours « vignetting » avec les deux « t » qui s’imposent. Le français, il est vrai, est de nos jours copieusement écorché par de plus en plus de gens mais ceux qui, comme moi, professent un certain respect pour leur propre langue, et particulièrement ceux qui écrivent et publient chaque mois, devraient s’attacher à ne pas populariser et, partant, à accréditer, des orthographes inexactes.

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